Chronique ouvrière

Enfin une vraie mesure de Gauche : La faute lourde n’est plus privative de l’indemnité de congés payés

jeudi 3 mars 2016 par Alain HINOT
CC Le 2 mars 2016.pdf

Le Conseil constitutionnel a censuré par une décision du 02 mars 2016 (ci-jointe) la disposition du code du travail qui prive le salarié licencié pour faute lourde du versement de l’indemnité compensatrice de congés payés de la période en cours.

Ce qui peut surprendre c’est que le motif adopté par les sages est totalement étranger à celui qui avait initialement justifié leur saisine le 2 décembre 2015 par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) mettant en cause l’art. L 3141-26 alinéa 2 CT, qui prévoit que l’indemnité compensatrice de congés payés "est due dès lors que la rupture du contrat de travail n’a pas été provoquée par la faute lourde du salarié" (façon curieuse d’indemniser l’employeur de la faute commise).

La question posée au Conseil constitutionnel était de savoir si cette OJNI (objet juridique non identifié) est compatible avec l’article 11 du préambule de la Constitution de 1946, qui garantit à tous "le repos et les loisirs".

Le représentant du gouvernement Hollande, très soucieux comme à son habitude de protéger les entreprises, s’était maladroitement opposé à la QPC en soulignant le nombre limité de cas et en estimant qu’en cas de faute lourde : "l’employeur subit un préjudice particulier ; l’action en responsabilité n’exclut pas de garantir un dédommagement minimum à l’employeur".

Le Conseil constitutionnel a néanmoins pris la décision de censurer la loi, mais aucunement en raison d’une éventuelle atteinte du droit au repos des salariés. Le juge constitutionnel s’extrait totalement de ce débat pour s’intéresser à un aspect radicalement différent : la rupture d’égalité entre les salariés.

Les sages remarquent en effet que la règle qui prive le salarié licencié pour faute lourde de son indemnité compensatrice de congés payés "ne s’applique pas lorsque l’employeur est tenu d’adhérer à une caisse de congés" (comme par exemple dans le BTP).

C’est une réalité, le salarié ayant travaillé pour un employeur affilié à une caisse de congés conserve toujours son droit à l’indemnité compensatrice de congés payés, même en cas de licenciement pour faute lourde. Selon le Conseil constitutionnel, cette différence de traitement entre salariés licenciés pour faute lourde est injustifiée et "méconnaît le principe d’égalité devant la loi".

L’article L. 3141-26 CT est donc partiellement abrogé et tous les salariés licenciés pour faute lourde doivent percevoir désormais une indemnité compensatrice de congé payé.

Ainsi, tout salarié licencié pour faute lourde dont le contentieux est en cours, ou qui peut encore introduire une action pour contester son licenciement, apparaît en droit d’exiger le paiement de son indemnité compensatrice de congé payé.

N’y aurait-il pas dans les lois Macron et El Komri quelques petites pépites de ce type à dénicher ?


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