Chronique ouvrière

Des CDD d’usage successifs irréguliers ne doivent pas cependant pousser le bon peuple à l’oisiveté

jeudi 20 juin 2013 par Alain HINOT
Cass Soc 24 avril 2013.pdf

Il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1244-1 et D. 1242-1 CT que dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des CDD lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à des CDI en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

Dans ce cas, des CDD successifs peuvent être conclus avec le même salarié.

Mais tout n’est pas permis en matière de "CDD d’usage" comme le rappelle la Cour de cassation par cet arrêt du 24 avril 2013 (n° 12-12773).

En effet, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 (clauses 1 et 5), qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de CDD successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de CDD successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.

Et conséquence, en cas de litige,l’employeur doit justifier des raisons objectives tenant à des circonstances précises et concrètes pour recourir à des CDD d’usage, sauf à encourir la requalification des CDD litigieux en un CDI (rejet du premier moyen de l’employeur).

Mais la décision de la cour d’appel de Versailles est partiellement cassée à propos de la problématique du paiement des salaires des périodes interstitielles qui peuvent séparées les CDD entre eux.

La curieuse position de la chambre sociale selon laquelle "le salarié engagé par plusieurs CDD non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat que s’il s’est tenu à la disposition de l’employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail" est ici malheureusement réaffirmée.

Il est difficile d’imaginer le mode de preuve que pourrait admettre nos hauts magistrats, car sauf à justifier de n’avoir occupé aucun emploi pendant ces périodes interstitielles et de n’avoir pas demandé le bénéfice de l’assurance chômage, le salarié qui ne désire pas mourir de faim où dormir sous les ponts doit bien rechercher un mode de subsistance en prenant un autre emploi d’attente.

Mais si "se tenir à disposition de l’employeur pour effectuer un travail", c’est juste ne pas travailler pour un autre employeur, reste alors la retraite dans un monastère cistercien ou dans un ashram (on trouve les deux en Périgor), à moins que l’on préfère le dilettantisme hippie et vagabond.


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