Chronique ouvrière

L’accès au principe de faveur menacé par la "nouvelle dynamique" de l’accord de compétitivité Renault

L’accord de groupe « Contrat pour une nouvelle dynamique de croissance et de développement social de Renault en France » du 13 mars 2013 comporte un chapitre 12 intitulé « Clauses administratives et juridiques ».

Dans ce chapitre, figure le paragraphe suivant :

« Afin de garantir l’économie générale du présent accord, dont l’application nécessite un caractère conventionnel homogène dans le périmètre visé au chapitre 1, et considérant les dispositions du présent accord comme globalement plus favorables à l’ensemble des salariés inclus dans son champ d’application, les parties conviennent qu’elles prévaudront sur celles, contraires ou différentes, des accords d’entreprises et d’établissements conclus précédemment. Il en sera ainsi, notamment, des stipulations du présent accord relatives au temps de travail (Chapitre 3, 4 et 5). Elles prévalent aussi de plein droit aux stipulations portant sur le même objet des accords d’établissements et des accords d’entreprises conclus selon les principes de l’accord du 15 avril 1999 ».

Les signataires de l’accord concernant le groupe constitué par RENAULT s.a.s. et ses filiales industrielles (MCA, SOVAB, STA, RST, ACI Villeurbanne, SOFRASTOCK International et la Fonderie de Bretagne) se décernent donc un satisfecit en considérant que les dispositions de cet accord sont « globalement plus favorables » que celles des dispositions des accords d’entreprises et des accords d’établissements portant sur les mêmes domaines. Et ils en déduisent que les stipulations de l’accord de groupe prévalent de plein droit sur celles des accords d’entreprises et d’établissements.

L’accord de groupe l’emporte automatiquement sur les accords d’entreprises et d’établissements. Ce sont les signataires de l’accord de groupe qui déterminent eux-mêmes quelles sont les dispositions conventionnelles les plus avantageuses pour les salariés. Il n’y a plus matière à intervention judicaire en vue de résoudre un conflit entre plusieurs normes conventionnelles : le postulat est posé par les signataires de l’accord de groupe que les dispositions qu’ils ont élaborées prévalent « de plein droit ».

La méthode de résolution des conflits mise en œuvre par le « Contrat pour une nouvelle dynamique de croissance et de développement social de Renault en France » a le charme de l’inédit. Mais elle présente également toutes les caractéristiques de la « voie de fait ».

I. L’accord de groupe ne se substitue pas à l’accord d’entreprise ou d’établissement. Le concours de normes conventionnelles entraîne l’application du « principe de faveur ».

En 1994, avant qu’intervienne la reconnaissance légale de la négociation de groupe, il a é été relevé qu’ « on s’est beaucoup interrogé sur la possibilité d’instituer une hiérarchie à l’intérieur d’un groupe entre accord de groupe et accords d’entreprise ou d’établissement afin d’unifier le statut du personnel de l’ensemble des entreprises du groupe ».

Cette interrogation se voyait donner une réponse sans ambiguïté.

« On voit mal, en effet, comment une négociation menée au niveau du groupe pourrait avoir pour objet de rendre caduque ce qui a déjà été négocié dans les entreprises. Seule une négociation menée à tous les niveaux peut conduire à une homogénéisation, qui ne pourrait être imposée au mépris d’accords déjà conclus, accords dont sait qu’ils peuvent être révisés ou dénoncés. Le principe hiérarchique ne reposant sur aucun texte, il ne peut donc délier certains employeurs des engagements qu’ils ont conclus dans les entreprises du groupe » (Ph. LANGLOIS, « La pluralité des conventions collectives applicables à un même contrat de travail », Le droit collectif du travail. Etudes offertes à Madame le Professeur Hélène SINAY, Peter Lang, 1994, 29).

Le 30 avril 2003, la Cour de cassation a rendu un arrêt qui a reconnu à l’accord de groupe la dimension juridique d’un véritable accord collectif de travail dans les termes suivants : « Des employeurs et des syndicats représentatifs peuvent instituer, pa voie d’accord collectif, en vue de négocier sur des sujets d’intérêt commun aux personnels des entreprises concernées du groupe, une représentation syndicale de groupe composée de délégués choisis par les organisations syndicales selon des modalités préalables, dès lors que les négociations pour lesquelles il lui donne compétence ne substituent pas à la négociation d’entreprise (Cass. Soc. 30 avril 2003, Liaisons sociales n° 815 du 12 mai 2003 ; Dr. Ouv. 2003, 398).

Il a été relevé que « la précision de l’arrêt selon laquelle la négociation de groupe ne doit pas se substituer à la négociation d’entreprise ou y faire obstacle n’est que l’application d’un principe général selon lequel les parties à un accord de groupe, différentes de celles d’un accord d’entreprise, ne peuvent prétendre limiter l’exercice du droit à la négociation à un autre niveau, spécialement dans l’entreprise. Indépendamment de ce principe, l’arrêt signifie aussi très clairement que la négociation de groupe, quand bien même elle est conduite du côté employeur par des entreprises du groupe, ne peut jamais valoir négociation d’entreprise obligatoire dans ces mêmes entreprises. Effectivement, si l’on pouvait se prévaloir d’une négociation interentreprises conduite dans les conditions de l’article L. 132-2 pour prétendre que les obligations de négocier dans l’entreprise sont remplies, il y aurait clairement violation des dispositions d’ordre public relatives à la négociation d’entreprise » (M.L. MORIN, « Les accords collectifs de groupe. Une variété d’accords collectifs de droit commun », RJS 10/03, 746).

D’autres commentaires ont tiré le même enseignement de l’arrêt Axa du 30 avril 2003.

« L’accord de groupe ne peut pas faire échec au principe de faveur. Celui-ci permet que la négociation au niveau inférieur ou spécial engendre des normes plus favorables aux travailleurs. Le principe étant d’ordre public, l’accord de groupe ne peut pas l’écarter… Interdit de substitution à l’accord d’entreprise, l’accord de groupe reçoit une vocation d’orientation, non contraignante, des négociations d’entreprise, à tout le moins dans le champ couvert par les obligations de négocier dans l’entreprise. Il ne peut empêcher la renégociation in favorem au niveau de l’entreprise » (P. RODIERE, « L’émergence d’un nouveau cadre de négociation collective ? », Semaine Sociale Lamy, 2003, n° 1125).

« Si on admet que l’accord de groupe puisse porter sur des thèmes objet d’un accord d’entreprise, celui-ci peut-il se substituer aux accords d’entreprise applicables au sein de différentes sociétés du groupe et ayant le même objet ?... Il semble cependant que si la substitution expresse ne peut en tant que telle être admise, le principe de faveur devrait tout naturellement avoir sa place. Ainsi, en cas de concours entre un accord de groupe et un accord d’entreprise préexistant et dont l’objet est le même, l’accord le plus favorable s’appliquerait » (J. GRANGE, N. EL AOUGRI, « La négociation de groupe », Semaine Sociale Lamy, 2003, n° 1144).

Les « conventions ou accords de groupe » sont aujourd’hui expressément prévus par les articles L. 2232-30 à L. 2232-5 du Code du travail.

Ces dispositions sont issues de de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative « à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social".

L’article 46 de la loi consacre le niveau du groupe d’entreprises pour la négociation collective et précise le régime applicable à ce niveau de négociation. Le texte de loi reste toutefois muet sur l’articulation entre l’articulation entre l’accord de groupe et l’accord d’entreprise.

Mais la circulaire DRT n° 09 du 22 septembre 2004, qui précise les nouvelles règles de la négociation collective issue du titre II de la loi du 4 mai 2004, est beaucoup plus explicite.

La fiche n° 5 de cette circulaire est consacrée aux « accords de groupe ».

Elle rappelle tout d’abord que les nouvelles dispositions légales ne font pas du groupe un nouveau niveau de négociation en tant que tel qui se situerait dans la hiérarchie des accords entre l’accord de branche et l’accord d’entreprise.

Elle reprend ensuite le principe posé par l’arrêt Axa selon lequel la négociation de groupe n’a pas vocation à se substituer à la négociation d’entreprise.

Elle précise enfin que « lorsque l’accord de groupe porte sur des domaines déjà traités par des accords d’entreprise, les clauses de l’accord de groupe ne peuvent prévaloir sur les stipulations des accords d’entreprises antérieurs ayant le même objet que si elles sont plus favorables pour les salariés ».

Cette absence de prééminence hiérarchique de l’accord de groupe et la mise en œuvre du principe de faveur d’entreprise ont été relevées à plusieurs reprises.

« Les différences relevées, sur un même point, entre les stipulations d’une convention ou d’un accord de groupe et celles d’une convention ou d’un accord d’entreprise, spécialement applicable dans l’une des entités du groupe, ne peut se résoudre par l’application d’un quelconque principe hiérarchique. Les salariés concernés pourront donc revendiquer, sur le point considéré, le bénéfice des stipulations qui leur seront le plus favorables. Ainsi, dès lors que « l’accord de groupe porte sur des domaines déjà traités par des accords d’entreprise, les clauses de l’accord de groupe ne peuvent prévaloir sur les stipulations des accords d’entreprise antérieurs ayant le même objet que si elles sont plus favorables pour les salariés » » (B. TEYSSIE, « Variations sur les conventions et accords collectifs de groupe », Dr. Soc. 2005, 649).

« L’on peut déduire de ces diverses dispositions que le principe de faveur demeure la règle lorsqu’il y aura lieu de résoudre le conflit entre les normes conventionnelles suivantes :

 un accord de groupe et les conventions et accords d’entreprise ou d’établissement du groupe : la loi nouvelle est silencieuse sur cette hypothèse de conflit, manifestement oubliée par le projet de loi aussi bien que dans les travaux parlementaires ; le principe de faveur devant nécessairement recevoir application, dans le silence de la loi, la jurisprudence précitée de la chambre sociale de la Cour de cassation , du 20 mars 1980, conserve toute son actualité »
(A. CHEVILLARD, « Les conflits de normes », Semaine Sociale Lamy, 2008, n° 1361).

II. Le « principe de faveur » : un « principe fondamental de droit du travail » dont le juge est le garant.

Le « principe de faveur » n’est pas secondaire en droit du travail.

« Entre tous les principes généraux du droit du travail, le plus fondamental est sans doute celui selon lequel « en cas de conflit de normes, c’est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application » » (G. COUTURIER, observations sous Cass. Soc. 19 février 1997, Dr. Soc. 1997, 433).

Ce principe fondamental est un « principe-règle » dont le contenu, en contexte de contentieux, « est apte à jouer comme règle applicable au litige au sens de l’art. 12, al. 1 nouv. C. pr. Civ. [« Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables »] ». Il donne la solution « du conflit naissant d’un concours de règles de sources différentes. L’originalité de cette solution est de retenir comme critère de primauté, non la hiérarchie de ces sources, mais la plus grande faveur pour les salariés » (A. JEAMMAUD, « Le principe de faveur. Enquête sur une règle émergente », Dr. Soc. 1999, 115 et s.).

Le statut de « principe fondamental de droit du travail » a été reconnu au « principe de faveur » par deux arrêts de la Cour de cassation du 17 juillet 1996 (Bull. V, n° 296 et 297) et par une décision du Conseil constitutionnel du 29 avril 2004 (décision n° 2004-494 DC du 29 avril 2004) (Voir S. LAULOM et N. MERLEY, « La fabrication du principe de faveur », RDT, 2009, 219 et s.).

Le « principe fondamental de droit du travail » est une « règle d’origine publique » qui occupe dans la hiérarchie des sources de droit du travail une place intermédiaire entre la loi et le règlement dans la mesure où la première est seule compétente pour y porter atteinte tandis que le second doit le respecter (voir B. MATHIEU, Les sources du droit du travail, Que sais-je ?, 6 et s.).

Les conventions et accords collectifs, qui figurent parmi les « règles d’origine privée » (voir B. MATHIEU, op. cit., 91 et s.), viennent après les « principes fondamentaux du droit du travail » dans la hiérarchie des sources du droit du travail.
C’est au juge qu’il appartient de faire prévaloir le « principe de faveur » en cas de concours de normes conventionnelles. Il lui appartient de résoudre le litige suscité par le refus d’octroyer l’avantage revendiqué en déterminant quelle est la disposition conventionnelle la plus favorable.

Comme l’a relevé Gérard COUTURIER, le principe de faveur « a pour corollaire la méthode de « pesée des avantages » qui sert à déterminer entre deux normes celle qui doit être considérée comme la plus favorable » (G. COUTURIER, obs. préc.). Et c’est bien évidemment au juge, et non à l’une ou l’autre des parties, de tenir la balance.

Gérard LYON-CAEN a souligné que ce sont les juges qui définissent l’ordre public en droit du travail, lorsqu’à l’occasion d’un différend ils sont amenés à se prononcer au regard du « principe de faveur » (G. LYON-CAEN, « L’état des sources du droit du travail (agitations et menaces) », Dr. Soc. 2001, 1034).

En tout état de cause, il est communément admis que la comparaison qui conduit à qualifier une disposition conventionnelle de « plus favorable » relève de l’office du juge (voir, par exemple, C. RADE, « L’appréciation de la notion de disposition plus favorable », Dr. Soc. 2000, 382 ; P. LOKIEC, Droit du travail / 2, 218).

Et la lecture des arrêts rendus par la Cour de cassation ne prêtent à aucune équivoque. C’est au juge qu’il appartient, en cas de concours de normes conventionnelles, de se livrer à la comparaison des avantages pour déterminer quel est le régime le plus favorable (voir, notamment, Cass. Soc. 3 novembre 1999, Liaisons sociales du 9 décembre 1999, jurisprudence n° 653 ; Cass. 18 janvier 2000, Bull. V, n° 27 ; Cass. 10 octobre 2007, n° 06-43068 ; Cass. Soc ; 19 décembre 2007, n° 06-43330, RDT 2008, 399).

La norme conventionnelle qui fait l’objet de la comparaison ne saurait, s’affranchissant du contrôle judicaire, décréter elle-même que c’est elle qui est a priori la plus avantageuse.

Le parallèle peut être fait avec la méthode mise en œuvre pour vérifier que les dispositions d’un accord collectif sont conformes à cet autre principe d’ordre public qu’est le principe d’égalité de traitement.

Lorsque la norme conventionnelle prévoit des différences de traitement, il ne suffit pas qu’elle expose les raisons qui la conduisent à considérer comme justifiées des disparités pour que les débats soient clos. C’est au juge qu’il appartient de contrôler si la finalité de la différence de traitement organisée conventionnellement est admissible au regard du principe d’égalité (voir Cass. Soc. 8 juin 2011, n° 10-11933, Bull. V, n° 143 ; Cass. Soc. 8 juin 2011, n° 10-14725, Bull. V, n° 155 : arrêts cités dans le n° 15946 du 30 septembre 2011 de Liaisons sociales, « La discrimination. L’égalité professionnelle », 34).

III. Les signataires de l’accord de groupe du 13 mars 2013 ont mis en place une « justice privée » qui interdit l’accès à un « tribunal qui décide » et au « principe de faveur ».

Il a été relevé que « dans certains cas, pour accéder au droit, il faut accéder au juge. Le droit d’accès à la justice est d’égale importance dans deux types de situations qu’on oppose souvent : celles dans lesquelles le souci principal est l’atteinte à une prérogative de la personne et celles dans lesquelles l’essentiel est la violation de la règle de droit » (M.A. FRISON-ROCHE, « Le droit d’accès à la justice », Libertés et droits fondamentaux, 9e éd., 402).

Par une décision du 21 janvier 1994 (n° 93-335 DC), le Conseil constitutionnel a rattaché le droit à un juge à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 qui assure « la garantie des droits » [« Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution »], tout en considérant qu’il puisse faire l’objet d’atteintes pourvu qu’elles ne soient pas substantielles.

Par sa décision du 9 avril 1996 (n° 96-373 DC), le Conseil constitutionnel a énoncé, toujours en se référant à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789,qu’ « en principe, il ne doit pas être porté d’atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction ».

Il résulte des dispositions de l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera, soit sur ses droit et obligations de caractère civil soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre lui ».

Le tribunal, au sens de l’article 6 § 1, est un tribunal qui décidera. « L’objet de la fonction juridictionnelle est de dire le droit en tranchant les litiges. L’acte de juger est fondamentalement « un acte d’option » qui oblige le juge à trancher en choisissant entre deux prétentions concurrentes » (L. MILANO, Le droit à un tribunal au sens de la Convention européenne des droits de l’Homme, Dalloz, 2006, 347).
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme est des plus nettes.

L’arrêt Sramek du 22 octobre 1994 (A 84 § 36) définit le « tribunal » au sens matériel du terme : il lui appartient de trancher, sur la base de normes de droit et à l’issue d’une procédure organisée, toute question relevant de sa compétence ».

« La compétence de décider est inhérente à la notion même de « tribunal » au sens de la Convention » (CEDH 23 octobre 1985, Bentheim c/ Pays-Bas, A 97 § 40).

« Pour qu’un « tribunal » puisse décider d’une contestation sur des droits et obligations de caractère civil en conformité avec l’article 6 § 1, il faut qu’il ait compétence pour se pencher sur toutes les questions de fait et de droit pertinentes pour le litige dont il se trouve saisi » (CEDH 13 février 2003, Chevrol c/ France, requête n° 49636/99, § 77).

Ce sont les signataires de l’accord de groupe du 13 mars 2013 qui déterminent eux-mêmes quelles sont les dispositions conventionnelles les plus avantageuses pour les salariés. Il n’y a plus matière à intervention judicaire en vue de résoudre un conflit entre plusieurs normes conventionnelles : le postulat est posé par les signataires de l’accord de groupe que les dispositions qu’ils ont élaborées prévalent « de plein droit » sur celles des accords d’entreprises et d’établissements.

Les signataires de l’accord de groupe du 13 mars 2013, qui se reconnaissent une prééminence hiérarchique, empêchent le salarié d’accéder au « principe de faveur » en lui interdisant d’accéder à un juge qui puisse décider si ce sont les dispositions de l’accord de groupe ou celles des accords d’entreprise ou d’établissement qui sont « globalement plus favorables ».

Le salarié se voit ainsi priver du droit d’exercer un « recours effectif » devant la juridiction prud’homale, qui se voit dépossédée du pouvoir de décider si les dispositions d’un accord d’entreprise ou d’un accord d’établissement sont plus favorables que celles de l’accord de groupe.

Nous sommes manifestement en présence d’un trouble « illicite », qui se définit comme le trouble « causé par un comportement contraire à la loi entendue au sens large, c’est-à-dire à l’ordre public, à un principe général du droit, à la loi… » (voir, dans ce sens, J. BUFFET, Conseils de prud’hommes. Formation de référé », Jurisclasseur Procédure civile, Fasc. 438).

Il y a violation de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789, de l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et du principe de faveur.

Il a été relevé que le trouble manifestement illicite peut résulter « du procédé qu’a utilisé une personne pour mettre fin au conflit, c’est à dire d’un acte de justice privée, d’une voie de fait » (S. GUINCHARD, C. CHAINAIS, F. FERRAND, Procédure civile, 31e éd., Dalloz, 1378).

Le paragraphe susvisé du chapitre 12 de l’accord de groupe du 13 mars 2013 présente toutes les caractéristiques de l’acte de justice privée qui relève de la « voie de fait ».

* * *

Pour faire cesser le trouble manifestement illicite constitué par la violation de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789, de l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et du principe de faveur, il peut être demandé au juge des référés du Tribunal de grande instance d’ordonner le retrait de l’accord de groupe du 13 mars 2013 du paragraphe :

« Afin de garantir l’économie générale du présent accord, dont l’application nécessite un caractère conventionnel homogène dans le périmètre visé au chapitre 1, et considérant les dispositions du présent accord comme globalement plus favorables à l’ensemble des salariés inclus dans son champ d’application, les parties conviennent qu’elles prévaudront sur celles, contraires ou différentes, des accords d’entreprises et d’établissements conclus précédemment. Il en sera ainsi, notamment, des stipulations du présent accord relatives au temps de travail (Chapitre 3, 4 et 5). Elles prévalent aussi de plein droit aux stipulations portant sur le même objet des accords d’établissements et des accords d’entreprises conclus selon les principes de l’accord du 15 avril 1999 »,

et ce, sous astreinte de 5000 € par jour de retard à compter d’un délai de 15 jours suivant la notification l’ordonnance.

En tout état de cause, il peut être demandé au juge des référés de dire que ce paragraphe de l’accord du 13 mars 2013 doit être privé d’effet.

Il peut également être demandé le versement à la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT de 10 000 € à titre de provision sur dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession par la violation du principe de faveur.

Annexe :

Accord du 13 mars 2013.pdf

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