Chronique ouvrière

Requête du Syndicat CGT des salariés de LOUVRE HOTELS

mercredi 15 août 2007

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Requête du Syndicat CGT des salariés de LOUVRE HOTELS au format Word

COUR EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME

Conseil de l’Europe
Strasbourg, France

REQUÊTE

présentée en application de l’article 34 de la convention européenne des Droits de l’Homme,
ainsi que des articles 45 et 47 du règlement de la Cour.

I. LES PARTIES

A. LE REQUERANT.

Syndicat CGT des salariés de L’unité Economique et Sociale LOUVRE HOTELS
Siège : 3, place du Général KOENIG 75017 PARIS
Tél : 01-45-74-43-26.

Représenté par Claude LEVY, Membre du Bureau du Syndicat

selon pouvoir de son Secrétaire Général, Diarra SISSOKO, dûment mandaté

Syndicat domicilié au 3, place du Général KOENIG 75017 PARIS
Tél : 01-45-74-43-26 Fax : 01-45-74-43-29.

B. LA HAUTE PARTIE CONTRACTANTE

L’Etat français

II. EXPOSE DES FAITS.

Le 22 août 2004, était publié au Journal officiel de la République française le décret
n° 2004-836 du 20 août 2004 portant modification de la procédure civile (voir pièce a).
L’article 39 de ce décret abrogeait l’article R. 517-10 du code du travail, qui prévoyait qu’en matière prud’homale, le pourvoi en cassation est formé, instruit et jugé suivant la procédure sans ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.

Saisi par la Confédération générale du travail d’un recours pour excès de pouvoir , le Conseil d’Etat, par son arrêt du 6 avril 2006, rejetait la demande d’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004 (voir pièce b).

Madame Catherine MARTINS, qui travaillait en qualité de femme de chambre pour la Société des HOTELS CONCORDE et qui avait été licenciée pour inaptitude médicale, décidait d’engager une procédure prud’homale pour faire juger son licenciement comme étant sans cause réelle et sérieuse.

Dans le cadre de cette procédure, intervenait un arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 6 décembre 2005, qui déboutait Madame Catherine MARTINS de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (voir pièce c).

Madame Catherine MARTINS déposait une demande d’aide juridictionnelle pour pouvoir poursuivre son procès devant la Cour de Cassation. Cette demande devait se heurter à un refus, fondé sur l’absence d’un moyen sérieux de cassation (voir pièce d).

Le défenseur syndical de Madame Catherine MARTINS, Monsieur Claude LEVY, membre du bureau du Syndicat CGT des salariés de l’Unité Economique et Sociale (UES) LOUVRE HOTELS, qui défend notamment les droits et intérêts des salariés des salariés employés par la Société des HOTELS CONCORDE (voir pièce e), demandait alors à l’Union Locale CGT du 14ème de bien vouloir témoigner de sa solidarité financière envers Madame Catherine MARTINS et de prendre en charge les honoraires d’un avocat habilité à intervenir devant la Cour de Cassation.

L’Union Locale CGT du 14ème donnait suite à cette demande et confiait à un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation le soin de former un pourvoi et de déposer un mémoire pour Madame Catherine MARTINS (voir pièce f).

III. EXPOSE DE LA VIOLATION DE LA CONVENTION, AINSI QUE DES ARGUMENTS A L’APPUI.

1) Le Conseil d’Etat, par son arrêt du 6 avril 2006, a considéré que « les disposition du décret du 20 août 2004, qui mettent fin à des dispenses de ministère d’avocat devant la Cour de cassation, ont pour objet tant d’assurer aux justiciables la qualité de leur défense que de concourir à une bonne administration de la justice en imposant le recours à des mandataires professionnels offrant des garanties de compétence ; qu’eu égard à l’institution par le législateur d’un dispositif d’aide juridictionnelle, l’obligation de ministère d’avocat ne saurait être regardée comme portant atteinte au droit constitutionnel des justiciables d’exercer un recours effectif devant une juridiction ; qu’elle ne sont pas davantage contraires à un principe de libre choix du mode défense en matière prud’homale, qui ne ressort d’aucun des principes ni des règles mentionnées plus haut » (règles et principes de valeur constitutionnelles, principes généraux du droit) (voir pièce b).

Le Conseil d’Etat a ainsi suivi les conclusions de son commissaire du Gouvernement, qui faisait valoir, s’appuyant sur l’arrêt M. et Mme HOFFMANN du 21 décembre 2001 (Rec. 653) qui s’était prononcé sur la légalité des dispositions réglementaires rendant obligatoires le ministère d’un avocat devant les juridictions administratives, qu’ « eu égard à l’institution par le législateur d’un dispositif d’aide juridictionnelle, l’obligation de ministère d’avocat ne saurait être regardé comme portant atteinte au droit constitutionnel des justiciables d’exercer un recours effectif devant une juridiction »(voir pièce g).

Le commissaire du gouvernement et, à sa suite, le Conseil d’Etat ont superbement ignoré le moyen, qui leur était présenté à l’appui de la demande d’annulation des dispositions réglementaires litigieuses, tiré de la violation de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantissant le droit d’accès à un tribunal. Le moyen soulignait que le système d’aide juridictionnelle mis en place auprès de la Cour de cassation se caractérise par un filtrage incompatible avec les exigences du procès équitable et que la combinaison de la représentation obligatoire pour former le pourvoi en cassation et de l’appréciation du caractère sérieux du moyen cassation pour octroyer l’aide juridictionnelle a pour effet de refuser l’accès au juge de cassation au justiciable qui n’a pas les moyens financiers de recourir aux services d’un avocat à la Cour de cassation (voir pièce h).

Mais un examen attentif du système instauré par l’article 39 du décret du 20 août 2004 fait ressortir que celui-ci n’est pas conforme aux exigences du procès équitable.
La Cour européenne des droit de l’homme a déjà eu l’occasion d’attirer l’attention, notamment en ce qui concerne l’accès au juge de cassation, sur ce qui peut porter atteinte « à la substance même du droit à un tribunal ».

Il doit préalablement être rappelé que la Cour a souligné que l’article 6§1 de la Convention, s’il garantit aux plaideurs un droit effectif d’accès aux tribunaux pour leurs décisions relatives à leurs « droits et obligations de caractère civil » laisse à l’Etat le choix des moyens à employer à cette fin et que l’instauration d’un système d’aide judicaire en constitue un, mais qu’il y en a d’autres, par exemple une simplification de la procédure(CEDH, 9 octobre 1979, Airey c / Irlande, série A, n° 32, § 26).

Cette simplification de la procédure, de nature à permettre un droit effectif d’accès au tribunal, caractérisait la procédure prud’homale française, des premiers juges jusqu’au juge de cassation, avant que n’intervienne le décret du 20 août 2004.

2) Le principe de libre choix du mode défense en matière prud’homale prévalait en matière prud’homale, y compris à l’occasion du traitement du pourvoi en cassation.

Les dispositions de l’article R.516-5 du code du travail permettent aux salariés concernés par une procédure prud’homale d’être assistés ou représentés par un salarié appartenant à la même branche d’activité ou par un délégué syndical ou par le conjoint ou par un avocat.

Cette pluralité des défenseurs possibles était permise, en cas de saisine de la Cour de cassation, par les dispositions de l’article R.517-10 du code du travail qui prévoyaient qu’ « en matière prud’homale, le pourvoi en cassation et formé, instruit et jugé suivant la procédure sans ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ».

Laisser le salarié se défendre seul ou confier ses intérêts à un défenseur non rompu aux arcanes de la formulation des moyens (et de l’éventuelle subdivision en branches) de cassation pouvait susciter des inquiétudes sur l’effectivité d’un réel accès au juge de cassation, en cas d’absence du ministère de l’avocat à la Cour de cassation.

Mais la procédure sans représentation obligatoire devant la Cour de cassation offrait alors des garanties appréciables.

Le fascicule 772 du Jurisclasseur de procédure civile, consacré à la « procédure sans représentation obligatoire devant la cour de cassation » souligne « qu’il y a un équilibre à trouver entre deux préoccupations .D’une part, le souci de ne pas opposer le barrage de l’ésotérisme aux justiciables que le nouveau Code de procédure civile dispense de l’obligation de recourir au ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation. D’autre part, la recherche de l’efficacité, qui conduit à exclure toute argumentation insusceptible de revêtir la moindre portée eu égard au rôle spécifique de la Cour de cassation, laquelle, comme il est souvent rappelé, ne constitue pas un troisième degré de juridiction ».

C’est pour cela que le moyen peut n’être que « sommaire » et qu’il appartient alors fréquemment au rapporteur de procéder à une véritable « reconstruction » du moyen pour l’adapter aux normes de présentation en usage devant la Cour suprême. S’il n’incombe pas au rapporteur d’inventer le moyen, il doit le « mettre en forme », c’est-à-dire le clarifier et le structurer.

Ainsi, comme il l’a été souligné dans la requête présentée au Conseil d’Etat en vue d’obtenir l’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004, il apparaît que, dans la procédure sans représentation obligatoire, le juge de cassation n’est pas dispensé de jouer un rôle que l’on peut qualifier d’ « actif », de nature à éviter l’exclusion par la Cour de cassation de la partie défavorisée. On était ici dans une logique qui rejoignait l’activité attendue dans le procès prud’homal, en vue de permettre un accès effectif au droit du travail.

Et il doit être relevé qu’avec ce système simplifié de présentation du moyen, qui caractérisait la procédure sans représentation obligatoire, n’était pas sans résultats.

Par exemple, en 2002, 24,91 % des pourvois présentés par un avocat devant la Cour de cassation ont donné lieu à l’intervention d’un arrêt de cassation. Ce pourcentage était loin d’être ridicule, lorsque le pourvoi était formé et instruit sans l’assistance d’un avocat : il était de 16, 63 % (voir pièce i).

C’est cette procédure simplifiée, applicable au traitement des pourvois en matière prud’homale, qui a été abrogée par les dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004, qui ont mis fin à la dispense du ministère d’avocat devant la Cour de cassation.

3) Dans son arrêt du 6 avril 2006, le Conseil d’Etat, pour rejeter la demande d’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004, s’est prévalu de l’existence d’un dispositif d’aide juridictionnelle.

Au regard de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’octroi de l’aide juridictionnelle est subordonné, en ce qui concerne l’accès à la Cour de cassation, à la double exigence de ressources inférieures à un plafond (réévalué annuellement) et d’un moyen sérieux de cassation (apprécié par le bureau établi près de la Cour de cassation, qui est présidé par un magistrat de la Cour de cassation en activité ou honoraire et qui comporte en plus deux membres choisis par la Cour de cassation).

Par son arrêt AERTS c / Belgique, la Cour a déjà eu l’occasion de juger que le filtrage des demandes d’aide juridictionnelle devant la Cour de cassation belge, filtrage fondé sur la justesse de la prétention, portait atteinte à « la substance même du droit à un tribunal » (CEDH, 30 juillet 1998, Aerts c / Belgique, Recueil des arrêts et décisions, 1998, V, 1964 et s.).

Le système de filtrage d’accès à la Cour de cassation fondé sur l’appréciation du moyen sérieux de cassation laisse parfois songeur.

Il a récemment été rappelé l’affaire d’une salariée, qui, après avoir vu sa demande d’aide juridictionnelle auprès de la Cour de cassation rejetée pour défaut de moyen sérieux, a pu poursuivre la procédure devant la Cour de cassation parce qu’une organisation syndicale a avancé le montant des honoraires dus à l’avocat au conseil d’Etat et à la Cour de cassation et, au final, a obtenu gain de cause, la Cour de cassation ayant accueilli son moyen… (voir pièce j).

Dans un autre arrêt, GNAHORE c / France (CEDH, 19 septembre 2000, Recueil des arrêts et décisions, 2000, X, 422 et s.), la Cour n’a pas considéré que l’appréciation d’un défaut de moyen sérieux de cassation pour refuser l’aide juridictionnelle constituait un obstacle au droit à un juge. Mais, pour arriver à cette conclusion, sans contredire l’arrêt AERTS, la Cour a souligné qu’en l’espèce le requérant agissait dans une matière (l’assistance éducative), dispensée de représentation obligatoire.

Même sans aide juridictionnelle, il pouvait former son pourvoi. Et la Cour s’est attachée à souligner que « s’il est difficile pour un profane d’exposer un moyen de cassation, elle constate que la procédure sans représentation obligatoire obéit à des règles spécifiques (articles 983-995 NCPC) et se trouve de ce fait notablement simplifiée par rapport à la procédure avec représentation obligatoire (articles 973-982 NCPC) ; ainsi, par exemple, les règles strictes de l’article 978 NCPC relatives à la présentation des moyens de cassation ne s’appliquent-elles pas ».

C’est ce qui a conduit la Cour, dans cette affaire, à juger que le système de filtrage mis en place par le dispositif d’aide juridictionnelle instauré auprès de la Cour de cassation était compatible avec les exigences du procès équitable.

Mais, aujourd’hui, la situation a changé.

La combinaison de la représentation obligatoire pour former le pourvoi en cassation et de l’appréciation du caractère sérieux du moyen de cassation pour octroyer l’aide juridictionnelle a pour effet de refuser l’accès au juge de cassation au justiciable qui n’a pas les moyens financiers de recourir aux services d’un avocat à la Cour de cassation.

L’atteinte à « la substance même du droit à un tribunal » est incontestable.

4) Du fait de l’intervention des dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004, Madame Catherine MARTINS, était contrainte de s’adresser à un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation pour pouvoir avoir accès au juge de cassation.

Monsieur Claude LEVY, membre du bureau du syndicat CGT des salariés de l’UES LOUVRE HOTELS, qui assistait en qualité de défenseur syndical Madame Catherine MARTINS devant le Conseil de Prud’hommes et devant la Cour d’Appel, a refusé de tenir pour acquis le défaut de moyen sérieux de cassation opposé à Madame Catherine MARTINS.

Il avait notamment en mémoire l’affaire d’une autre employée de l’hôtellerie, Madame SMAILI, qui avait vu celle-ci obtenir gain de cause devant la Cour de Cassation, après avoir vu sa demande d’aide juridictionnelle rejetée pour défaut de moyen sérieux (voir pièce j). Sans la solidarité syndicale, qui avait pris en charge les honoraires d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, Madame SMAILI, après le rejet de sa demande d’aide juridictionnelle, n’aurait pas pu accéder au juge de cassation.

Dans l’affaire de Madame Catherine MARTINS, Monsieur Claude LEVY avait mis en évidence que l’argument tiré de l’impossibilité d’assurer le reclassement de l’intéressée au sein de l’unité économique et sociale LOUVRE HOTELS était complètement surréaliste (voir pièce k).

Le Syndicat CGT des salariés de l’UES LOUVRE HOTELS ayant par ailleurs à faire face à d’importantes dépenses, Monsieur Claude LEVY s’est adressé à l’Union Locale CGT du 14ème pour que celle-ci prenne en charge le montant des honoraires de l’avocat spécialisé, devenu nécessaire à la poursuite de la procédure devant la Cour de cassation.

Cette situation n’est pas acceptable.

Faire dépendre l’accès au juge de cassation de la circonstance qu’une organisation syndicale ait les ressources financières suffisantes à consacrer à la prise en charge des honoraires d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ne garantit pas le droit d’accès au tribunal. (On peut même envisager qu’à la même période, plusieurs salariés s’adressent à l’organisation syndicale pour que celle-ci les aide financièrement à pour suivre leur procès prud’homal devant la Cour de cassation).

Le système mis en place par l’article 39 du décret du 20 août 2004 porte une atteinte certaine à la « substance même du droit à un tribunal ».

IV. EXPOSE RELATIF AUX PRESCRIPTIONS DE L’ARTICLE 35 § 1 DE LA CONVENTION.

Décision interne définitive : arrêt du Conseil d’Etat du 6 avril 2006 (pièce b).

En ce qui concerne les possibilités de recours.
Après avoir vu sa demande d’aide juridictionnelle rejetée, Madame Catherine MARTINS s’est renseignée sur les conséquences d’un pourvoi qui aurait été formé (soit par elle-même, soit par son défenseur syndical) sans le concours d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.
Elle a appris que s’il avait été formé un pourvoi non présenté par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, ce pourvoi aurait été déclaré irrecevable (voir Cass. Civ., 5 mars 1969, Bull., II, n° 69).

Il lui a également été expliqué que l’arrêt de la Cour de cassation prononçant l’irrecevabilité de son pourvoi n’était susceptible d’aucune voie de recours, la décision d’irrecevabilité ne figurant pas parmi les exceptions permettant de revenir sur une décision rendue par la Cour de cassation (voir « Effets et suites des arrêts de la Cour de cassation », Jurisclasseur procédure civile, Fasc. 798, (3) à (8) ).

Les dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004 sont des dispositions réglementaires, qui peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

Le recours pour excès de pouvoir est un « recours d’utilité publique, qui doit pouvoir être exercé par le plus grand nombre de personnes possible » et « l’intérêt personnel à agir dont le requérant doit justifier est libéralement apprécié, au point qu’à certains égards le recours pour excès de pouvoir est proche de ce que serait une « action populaire » (exerçable par n’importe qui)… » (voir R. CHAPUS, Droit administratif général, Tome 1, 15e éd., 788).

Dans le délai de deux mois courant à partir du 22 août 2004 (date de publication des dispositions litigieuses), Madame Catherine MARTINS aurait donc été recevable à exercer un recours pour excès de pouvoir contre l’article 39 du décret du 20 août 2004.

Mais , d’une part, Madame Catherine MARTINS n’avait pas connaissance de ce texte et, d’autre part, à l’époque, elle n’était pas confrontée aux problèmes suscités par l’obligation d’une représentation devant la Cour de cassation en matière prud’homale. (L’arrêt de la Cour d’Appel de Paris rejetant les demandes de Madame Catherine MARTINS est intervenu le 6 décembre 2005).

Le droit administratif français permet à une personne victime d’une disposition réglementaire illégale de contester cette décision, malgré l’expiration du délai de recours pour excès de pouvoir.

En effet, la disposition réglementaire contestée, « n’étant pas une décision juridictionnelle, n’acquerra pas pour autant une autorité qui la rendrait incontestable. Elle ne peut plus être attaquée de front, mais, dans certaines limites, elle peut faire l’objet d’une contestation oblique d’un grand intérêt pratique » (voir R. CHAPUS, op. cit., 803).

A l’appui d’un recours formé contre une décision procédant de celle qui est devenue définitive (la « décision de base »), le justiciable peut invoquer une exception tirée de son illégalité. Et cela, à toute époque.

Seulement, pour que cette « exception d’illégalité » de l’article 39 du décret du 20 août 2004 puisse être soulevée par Madame Catherine MARTINS, il aurait fallu que lui soit ouvert le recours contre une décision d’irrecevabilité qui aurait été prononcée par la cour de cassation, si elle avait présenté son pourvoi tout seul ou avec l’aide d’un défenseur non habilité à intervenir devant la Cour de cassation.

Or, comme il l’a été relevé un peu plus haut, ce recours n’était pas possible.

De surcroît, même si Madame Catherine MARTINS avait eu la faculté de contester la décision d’irrecevabilité prononcée par la cour de cassation, la discussion sur la conformité aux dispositions de l’article 6 de la Convention européenne de l’article 39 du décret du 20 août 2004 n’aurait eu aucun effet utile.

Le Conseil d’Etat n’aurait pas examiné la question soulevée par Madame Catherine MARTINS avant le 6 avril 2006. Or, par son arrêt définitif rendu à cette date, le Conseil d’Etat a conclu à la validité des dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004.

C’est cette inexistence de voies de recours internes, accompagnée d’une inutilité d’un éventuel recours, qui conduit le Syndicat CGT des salariés de l’UES LOUVRE HOTELS, qui a pour objet la défense des droits et des intérêts des salariés des hôtels CONCORDE, dont fait partie Madame Catherine MARTINS, et qui refuse d’admettre que le Conseil d’Etat n’ait pas pris au sérieux le moyen soulevé par la CGT, à laquelle il est statutairement affilié, tiré de la violation de l’article 6§1 de la Convention, à s’adresser à la Cour européenne des droits de l’homme pour faire juger l’incompatibilité des dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004 avec les exigences du procès équitable.

V. EXPOSE DE L’OBJET DE LA REQUETE.

Il est demandé à la Cour de juger que les dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004, qui mettent fin en matière prud’homale à la dispense d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, portent atteinte à la substance même du droit à un tribunal et, par là même, violent l’article 6 § 1 de la Convention.

VI. AUTRES INSTANCES INTERNATIONALES TRAITANT OU AYANT TRAITE L’AFFAIRE.

Aucune.

VII. PIECES ANNEXEES.

a) Décret du 20 août 2004 portant modification de la procédure civile.

b) Arrêt du Conseil d’Etat du 6 avril 2006.

c) Arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris le 6 décembre 2005.

d) Décision de refus prise par le Bureau d’Aide juridictionnelle de la Cour de cassation.

e) Statuts du Syndicat CGT des salariés de l’UES LOUVRE HOTELS.

f) Courrier de l’UL CGT du 14ème en date du 6 juin 2006.

g) Conclusions du commissaire du gouvernement sous l’arrêt du Conseil d’Etat du 6 avril 2006.

h) Texte du mémoire ampliatif déposé à l’appui de la requête tendant à l’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004.

i) Statistiques des décisions sur les pourvois devant la Chambre sociale de la cour de cassation pour l’année 2002.

j) Arrêt de la Cour de cassation du 22 février 2006, plus la note du Droit Ouvrier.

k) Conclusions déposées par Monsieur Claude LEVY devant la Cour d’Appel de Paris.

VIII. DECLARATION ET SIGNATURE.

Je déclare en toute conscience et loyauté que les renseignements qui figurent sur la présente requête sont exacts.

A Paris, le 25 septembre 2006

Pour le Syndicat CGT des salariés
de l’UES LOUVRE HOTELS

Claude LEVY


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