Chronique ouvrière

Pas d’application directe d’un accord de branche pour annualiser le temps de travail !

mardi 29 avril 2008 par Alain MENNESSON

Depuis la succession des Lois Larcher et Fillion en matière de temps de travail, certains accords d’entreprise qui ne prévoyaient pas de modulation c’est-à-dire des semaines hautes ou basses sur l’ensemble de l’année, sont revues sous la pression des patrons et font l’objet d’avenants ou carrément de nouveaux accords.

A l’issue de ces discussions, le refus des syndicats de les signer ou le droit d’opposition exercé par les syndicats majoritaires n’empêche pas les patrons d’appliquer unilatéralement une nouvelle organisation du temps de travail dans l’entreprise avec ces fameuses modulations. Ils s’appuient derrière les articles 8-2 et 8-5 de l’accord de branche de la métallurgie de juillet 1998 qui stipule pour ce dernier, qu’en l’absence de délégués syndicaux (et donc d’accords), « l’employeur consultera le C.E ou à défaut les délégués du personnel sur la manière dont sera organisée le temps de travail sur l’année ».

Or, un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 12 mars 2008 vient de nous dire : L’accord de modulation doit prévoir la programmation des horaires !

Cass.soc., 12 mars 2008, n°06-45.274, Sté. Les Ateliers de Belleville et a. c/Houziaux (Convention Collective Textile et Habillement)

« A défaut d’accord d’entreprise, un accord de branche ne peut permettre à lui seul la mise en œuvre de la modulation du temps de travail s’il ne précise pas, ainsi que l’impose l’article L.212-8 du Code du Travail, le programme indicatif de la répartition de la durée du travail.

La modulation ne peut être mise en œuvre que par accord d’entreprise ou accord de branche étendu (C.trav., L.212-8 * C.trav.nouv., art. 3122-9). Mais cet accord collectif doit comporter, parmi les mentions obligatoires, le programme indicatif de la répartition de la durée du travail.

En l’espèce, l’accord de branche (dans l’affaire citée) ne fixe qu’une amplitude maximale de variation des horaires modulés (44 heures sans pouvoir dépasser 42 heures sur 12 semaines consécutives).

Ces dispositions conventionnelles ne sont pas jugées suffisantes par la Cour de cassation pour permettre une application directe de l’accord de branche dans l’entreprise.

Il s’ensuit qu’à défaut d’accord d’entreprise, le salarié peut donc demander le paiement des heures supplémentaires.

Rappelons que la modulation permet de ne pas considérer les heures effectuées au-delà de 35 heures comme des heures supplémentaires dès lors qu’à la fin de la période de modulation (année civile ou autre période de 12 mois), la durée légale est respectée (les 1.607 heures).

Si l’accord de modulation n’est pas conforme, les heures supplémentaires effectuées ne peuvent plus être compensées et doivent donc être payées et majorées. »

Chacun comprend l’intérêt d’un tel arrêt qui pourrait aider les syndicats et les salariés dans les entreprises de la métallurgie où les patrons envisageraient des modifications d’accord pour annualiser le temps de travail. En effet notre accord de branche ne peut pas être d’application directe en l’absence d’accord puisque comme expliqué ci-dessus, il ne prévoit pas ce programme indicatif de la répartition de la durée du travail sur l’année dans son article 8-5 de juillet 1998 qui avait été d’ailleurs annulé par le Tribunal de Grande Instance de Paris le 18 mars 200 (FTM – CGT représentée par M.L. Dufresne Castets et Michel Henry contre UIMM).


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