Chronique ouvrière

La Cour de cassation a fait une bonne lecture : les dispositions du Code du Travail ne permettent pas aux intérimaires déjà en poste de remplacer des grévistes

lundi 14 mars 2011 par Pascal MOUSSY
Cass. Soc. 2 mars 2011.pdf

Le premier article de doctrine mis en ligne sur le site de Chronique Ouvrière (Pascal MOUSSY, « Chez Peugeot-Citroën, glissement-précarité : un tandem infernal pour le libre exercice du droit de grève », Chronique Ouvrière du 13 août 2007) s’attachait à montrer que le nouveau régime juridique du recours aux contrats précaires issu de la loi du 12 juillet 1990 posait le principe de l’interdiction absolue d’utiliser ces contrats pour tenter de briser l’exercice du droit de grève.

Il soulignait que les dispositions légales sont désormais animées d’un notable souci d’efficacité et doivent permettre de neutraliser les effets du glissement des travailleurs précaires sur les postes habituellement occupés par les grévistes. L’article L. 122-1 (L. 1242-1 recod.) du Code du Travail, relatif au contrat de travail à durée déterminée, comme l’article L. 124-2 (L. 1251-5 recod.), concernant le travail temporaire, ne se contentent plus, comme les précédentes moutures, de disposer que les contrats précaires ne peuvent « avoir pour objet » de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Ils spécifient qu’ils ne sauraient avoir « ni pour objet ni pour effet » de pourvoir durablement ce type d’emploi.

L’article mis en ligne sur le site de Chronique Ouvrière soumettait à la critique un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 17 juin 2003, Syndicat départemental CGT de la Poste du Sud c / La Poste, qui avait admis le glissement sur la tournée d’un facteur gréviste d’un contractuel initialement engagé pour une durée déterminée pour remplacer un agent en congé maladie (Dr. Ouv., 2004, 83 et s., note Isabelle MEYRAT ; RJS, 10 / 03, n° 1125), en faisant ressortir en quoi cette décision était contraire à la lettre du texte issu de la loi du 12 juillet 1990.

Aujourd’hui, en toute logique, d’après les motifs de l’arrêt qui vient d’être rendu le 2 mars, le glissement ne devrait plus trouver grâce aux yeux de la Cour de cassation.
«  Soucieuse de garantir l’effectivité du droit de grève, la chambre sociale de la Cour de cassation précise, dans un arrêt du 2 mars, que l’interdiction légale de recourir au travail intérimaire pour le remplacement de salariés grévistes vise non seulement l’embauche en cours de conflit, mais également l’augmentation du volume de travail des intérimaires déjà en poste  » (Liaisons Sociales n° 15813 du 11 mars 2011).

La Chambre sociale a en effet considéré que « l’article L. 1251-10, 1er, du code du travail a pour objet d’interdire à l’employeur de recourir au travail temporaire dans le but de remplacer des salariés en grève et de priver leur action d’efficacité ».

Le premier alinéa de l’article L. 1251-10 précise qu’ «  il est interdit de recourir au travail temporaire  » pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d’un confit collectif de travail. Du fait de la recodification (présentée comme s’étant faite à droit constant), il s’est substitué à l’alinéa premier de l’article L. 124-2-3, qui soulignait qu’ «  en aucun cas, un contrat de travail temporaire ne peut être conclu  » pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu par suite d’un conflit collectif de travail.

La rédaction de 2008 a apparemment eu la vertu de faciliter la compréhension du texte de 1990.


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