Chronique ouvrière

Rupture conventionnelle et accident du travail : Ils ont franchi le Rubicon

samedi 4 octobre 2014 par Alain HINOT
Cass. Soc. le 30 septembre 2014.pdf

Dans un arrêt de rejet du 30 septembre 2014 (n° 13-16297 PB), la Cour de cassation admet la possibilité d’une rupture conventionnelle au cours de la période de suspension du contrat consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, sous réserve de l’absence de fraude ou de vice du consentement, et ce même en l’absence de visite médicale de reprise.

Une salariée est victime d’un accident du travail en février 2009 suivi d’une dizaine de jours d’arrêt de travail. Elle reprends son poste sans passer de visite médicale de reprise et travaille pendant plusieurs mois, puis elle signe une rupture conventionnelle le 7 juillet 2009.

Par la suite, la salariée saisie le Conseil de prud’homme pour voir annuler la rupture conventionnelle, en faisant valoir que selon l’art. L 1226-9 CT, la rupture du contrat de travail d’un salarié pendant la période de suspension de celui-ci consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle ne peut être prononcé que pour une faute grave de l’intéressé ou de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie.

La Cour de cassation balaye laconiquement le moyen et considère que, sauf fraude ou de vice du consentement, non invoqués en l’espèce, une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours de la période de protection consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Il est à craindre que nos magistrats du quai de l’Horloge ne s’arrêtent pas en si bon chemin et fassent aussi voler en éclats la protection de la femme enceinte. Permettront-ils aussi aux employeurs de contourner l’obligation de reclassement des salariés inaptes par ce même moyen ?

Une réaction des juges du fond et/ou du pouvoir politique est nécessaire, car ce qu’il conviendrait de mettre à néant c’est la rupture conventionnelle elle-même dont l’ADN contient un vice originel (voir notre brève du 28 février 2014).

Notons que ce mode de rupture des contrats de travail est aujourd’hui celui le plus usité (loin devant les licenciements économiques) et que depuis sa création en 2008 il a orienté vers Pôle emploi un million de salarié.


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