Chronique ouvrière

De l’utilisation avec Bonheur du référé "production" art. 145 CPC et autres

samedi 8 février 2014 par Alain HINOT
CA Versailles 12 Nov 2013.pdf

L’article 145 CPC prévoit que : "S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé".

Cette disposition peut notamment être utiliser pour recueillir des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination salariale ou pour faire la preuve d’une différence de traitement en matière de rémunération.

Dans la décision ici annexée (arrêt Bonheur c/ Pourtout - Cour d’appel de Versailles 6ème du 12 novembre 2013), les juges font application du texte (l’existence d’un motif légitime) et ordonnent à une société de produire des bulletins de salaire de divers salariés sous astreinte afin que le demandeur puisse vérifier si’il est ou non victime d’une discrimination, et ce, alors que l’employeur prétendait qu’une telle production pouvait porter atteinte à la vie privée des intéressés. La Cour rejette le moyen en estimant que les éléments sollicités sont nécessaires "à la protection des droits de la partie qui les a sollicité".

Cette décision s’inscrit dans la continuité d’un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 19 décembre 2012 (n° 10-20526 10-20528 PB), qui a jugé que le respect de la vie personnelle d’un salarié (dont la fiche de salaire sera communiquée) ne constitue pas en soit un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, "dès lors que le juge constate que les mesures demandées procèdent d’un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées".

Ainsi la procédure prévue par l’article 145 du code de procédure civile n’est pas limitée à la conservation des preuves et peut aussi tendre à leur établissement, dès lors, un salarié est légitime à obtenir la communication de documents nécessaires à la protection de ses droits, dont seul l’employeur dispose et qu’il refuse de communiquer.

Rappelons cependant que les art. R 1455-5 à R 1455-7 CT permettent aussi d’obtenir la communication de tels documents en référé en absence de contestation sérieuse ou à raison de l’existence d’un différend ou pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans le cas d’une action en "discrimination salariale", le juge des référés a donc à sa disposition un choix de formule qui s’adapte à toutes les situations afin de protéger les droits du salarié, d’autant que l’employeur a, dans ce domaine, une grande part du régime probatoire à sa charge.


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