Chronique ouvrière

Où il se révèle que l’Union des Syndicats Anti-précarité (SAP) est bien une véritable organisation syndicale

samedi 7 décembre 2013 par Alain HINOT
Cass Soc Le 04 décembre 2013.pdf

Dans un commentaire, publié sur le site Chronique Ouvrière le 06 décembre 2012 à propos d’un arrêt Cass soc du 15 novembre 2012 (SAP c/ CGT n° 12-27315 PB) qui avait rejeté le pourvoi du SAP contre un jugement du TI de Paris 15ème qui lui refusait le droit de concourir lors du scrutin "TPE" de décembre 2012, au motif que son "objet était illicite" parce que prétendument trop versé dans l’action juridique, nous étions très critique.

En effet, dans cet arrêt du 15 novembre 2012, la Cour de cassation s’en était placidement tenue aux constatations du juge d’instance et à l’interprétation qu’il avait fait des seuls statuts et de la profession de foi du SAP, alors même qu’à hauteur de cassation l’organisation apportait moultes preuves d’une activité syndicale « classique » importante, notamment dans les entreprises.

Nous disions par exemple que cette façon de renvoyer à l’appréciation souveraine d’un juge unique, sans la garantie du double degré de juridiction, est d’autant plus critiquable que le Conseiller rapporteur indiquait très clairement dans son rapport : « Les statuts affirment l’action juridique comme un mode d’action essentiel, mais non exclusif » et que dans son avis l’avocat général admettait : « Que l’objet de ce syndicat est conforme aux dispositions du code du travail, qu’il ne résulte pas de ses statuts que son activité soit exclusivement tournée vers le conseil juridique, l’assistance juridique ou l’action en justice ».

Contre l’opinion dominante largement popularisée (notamment par la presse juridique d’obédience patronale, mais aussi par quelques vecteurs syndicaux salariés "aux ordres"), nous affirmions que cette décision ne valait que pour le scrutin national TPE, d’autant que le SAP n’avait pas disposé d’un délai suffisant devant le TI de PARIS 15ème pour organiser sa défense et pour démontrer la réalité de son implantation syndicale de "terrain" (désignations RSS et DS, PV d’élections, tracts, etc…) et nous concluions en ce que l’arrêt du 15 novembre 2012 était donc limitée, à notre sens, au seul objet de l’instance « scrutin national TPE » (autorité relative de la chose jugée).
Cette appréciation minoritaire vient pourtant d’être validée par deux arrêts de la Cour de cassation du 04 décembre 2013 ci-annexés (n° 13-14401 et 13-12678), par lesquels la haute Cour rejette les pourvois de deux sociétés contre des jugements de Tribunaux d’instance ayant validé la nomination de RSS par le SAP (Courbevoie - 11 février 2013 pour une désignation a effectué après l’arrêt du 15 novembre 2012 et Paris 17ème - 08 mars 2013 pour une désignation antérieure à l’arrêt du 15 novembre 2012).

Ces deux arrêts du 04 décembre 2013 précisent notamment que le SAP « dispose d’adhérents, d’élus, de DS dans diverses entreprises", qu’il "déploient des actions revendicatives dans les entreprises » (notamment par des « tracts et des pétitions »), qu’il a « signé plusieurs PAP », qu’il a « négocié et signé un protocole de fin de conflit », qu’il est « impliqué (outre l’action judiciaire) dans la défense des droits et des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu’individuels, des personnes visées par ses statuts ».

En conséquence, le SAP est bien une organisation syndicale qui peut légitimement nommer des RSS et concourir dans toutes élections professionnelles. Dommage que cette évidence n’a pas été remarquée à l’occasion du contentieux TPE de 2012, puisqu’à l’évidence il apparaît aujourd’hui que le SAP a été écarté d’un scrutin national de façon totalement anti-démocratique et arbitraire.

Notons aussi que la Cour de cassation tient à rappeler dans un des arrêts du 04 décembre (13-12678) : "qu’aux termes de l’article 64 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, modifié par la loi du 31 décembre 1990 que les syndicats et associations professionnels régis par le code du travail peuvent donner des consultations juridiques et rédiger des actes sous seing privé au profit des personnes dont la défense des intérêts est visée par leurs statuts, sur des questions se rapportant directement à leur objet à la condition qu’il ne s’agisse pas de leur activité exclusive".

Une façon d’indiquer aux organisations syndicales de salariés (puisque les organisations d’employeurs l’ont compris depuis fort longtemps), que leurs missions ne sont pas seulement revendicatives ou contestataires, mais qu’il leur appartient aussi (comme le prône le SAP notamment dans ses statuts), de constituer des services juridiques efficaces et actifs afin de réellement défendre les intérêts matériels et moraux des adhérents et des salariés, tant individuels que collectifs.


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