Chronique ouvrière

Il est ordonné au chef d’entreprise qui n’a pas consulté le comité d’entreprise sur la dénonciation d’un accord collectif de retirer sa note de service !

vendredi 28 mars 2008 par Pascal MOUSSY
la décision de la Cour de Cassation du 5 mars 2008.pdf
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Les dispositions de l’article L.431-4 du Code du Travail posent le principe que « le comité d’entreprise a pour objet d’assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production ».

Cette expression collective des intérêts des salariés doit pouvoir se faire entendre avant que le chef d’entreprise arrête sa décision. Celle-ci doit dont être précédée de la consultation du comité d’entreprise (art. L.431-5 du Code du Travail).

Cette consultation est obligatoire sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise et, notamment,sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelle du personnel (art. L.432-1 du Code du Travail).

Par un arrêt du 5 mai 1998 (n° 96-13498, Bull. V, n° 219), la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a précisé qu’il n’y avait pas lieu de faire une distinction entre une décision unilatérale et une décision prenant la forme de la négociation d’un accord collectif d’entreprise. Lorsqu’il est envisagé de conclure un accord portant sur une question visée par l’article L.432-1 du Code du Travail, la consultation du comité d’entreprise doit donc intervenir concomitamment à l’ouverture de la négociation et au plus tard avant la signature de l’accord.

C’et la même logique qui doit présider à la dénonciation d’un accord collectif.
La dénonciation doit être postérieure à la discussion avec les représentants des salariés au comité d’entreprise.

Il a été relevé par la Cour d’Appel de Paris, dans un arrêt du 6 mars 2002 (n° 2000-61041), que « le caractère discrétionnaire de la dénonciation d’un accord collectif de travail n’est pas incompatible avec l’obligation préalable d’information du comité d’entreprise qui, sans remettre en cause le droit de dénonciation appartenant aux signataires de l’accord, a seulement pour objet de permettre un échange entre employeurs et représentants des salariés sur les questions en débat ».

Par son arrêt du 5 mars 2008, la Cour de Cassation affirme elle aussi la règle qui veut que le comité d’entreprise soit consulté sur la dénonciation par le chef d’entreprise d’un accord d’entreprise qui intéresse l’organisation, la gestion ou la marche générale de l’entreprise. Si la consultation n’a pas eu lieu, la dénonciation demeure sans effet jusqu’à l’accomplissement de cette formalité.

Deux sociétés formant une unité économique et sociale ne peuvent donc pas valablement substituer une note de service relative à l’aménagement et à la réduction du temps de travail à des accords portant sur la même question qu’elles avaient dénoncé sans consultation préalable du comité d’entreprise.

La consultation sur le projet de note de service consécutif à la dénonciation ne valait pas consultation sur la dénonciation de l’accord.

En décidant d’appliquer la note de service qui ne pouvait légalement remplacer les dispositions des accords irrégulièrement dénoncés, les chefs des deux entreprises constituant l’unité économique et sociale prenaient une mesure constitutive d’un trouble manifestement illicite.

Le juge des référés, s’appuyant sur les dispositions de l’article 809 du Nouveau code de procédure civile qui lui permettent de prendre les mesures de nature à faire cesser un trouble manifestement illicite, était dès lors habilité à ordonner, sous astreinte, le retrait de la note de service prise par les employeurs ayant agi de façon unilatérale sans se confronter préalablement au point de vue des représentants des salariés sur la dénonciation des accords sur l’aménagement et la réduction du temps de travail.


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