Chronique ouvrière

La liberté syndicale s’applique aussi aux cadres : Syndiquez vous, syndiquez vous et surtout créez des syndicats

jeudi 16 août 2012 par Alain HINOT
Cass. Soc. 3 juillet 2012.pdf

Un salarié engagé le 17 juillet 1989 en qualité de "directeur de la division télésurveillance" par la société Groupe Scutum avait créé avec deux autres salariés le syndicat UNSA-Scutum en avril 2006 et informé la société Groupe Scutum de cette création n en mai 2006.

Le 01 juin 2006, il procède à l’affichage d’un tract syndical évoquant des restructurations de la direction et informant les salariés de la création du syndicat.

Par la suite il était convoqué à un entretien préalable avec mis à pied à titre conservatoire et licencié le 24 juillet 2006. Contestant ce licenciement qu’il considérait comme fondée sur son activité syndicale, le salarié saisissait la juridiction prud’homale en janvier 2007.

In fine, il était débouté de toutes ses demandes par la cour d’appel de Toulouse, laquelle retenait d’une part que : "le salarié faisait partie du comité de direction de la société et que son poste se situait parmi les plus importants de la hiérarchie, qu’il disposait ainsi, notamment dans le cadre restreint et discret du comité de direction, des moyens de faire entendre sa voix sur la question de la mise en oeuvre de la restructuration en cours, sans porter préjudice à son employeur et dans le respect de l’obligation de loyauté renforcée à laquelle il était soumis en sa qualité de cadre dirigeant".

Par cet arrêt du 04 juillet 2012 PB, la Cour de cassation casse sévèrement l’arrêt d’appel en jugeant que les juges du fond ont violé les articles L. 1132-1, L. 2141-5 et L. 1134-1 du code du travail, puisque la cour d’appel "avait constaté que la lettre de licenciement reprochait au salarié la création du syndicat UNSA-Scutum à laquelle il avait participé ainsi qu’un défaut de loyauté pour avoir tardé à informer la direction de la création de ce syndicat et de sa participation à son bureau exécutif", de sorte que "le salarié apportait des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination syndicale".

La cour d’appel avait encore retenu que "le tract du 1er juin 2006 rédigé sur papier à en-tête de l’UNSA-Scutum mentionne : “l’angoisse, le stress, la méfiance et les incertitudes des uns et des autres et ce, face aux rumeurs et autres restructurations tant sournoises qu’hasardeuses, nous ont conduit à la création d’un syndicat autonome d’entreprise”" et que "les adjectifs utilisés pour qualifier la restructuration « hasardeux » et surtout « sournois » sont clairement péjoratifs et injurieux envers la direction qui l’a décidée, la circonstance que ces critiques émanent d’un cadre qui était jusque là impliqué dans la conception et la mise en oeuvre de ce projet et qui en connaissait donc les tenants et les aboutissants, ce qui renforçait le poids de ses critiques, étant de nature à créer ou à nourrir la défiance des salariés envers la direction de l’entreprise, et que M. X... a donné à son action le maximum de publicité en affichant ou faisant afficher ce tract dans les deux établissements de Toulouse et de Cergy et en s’en entretenant avec certains salariés pendant les heures de travail et sur les lieux de travail".

Cet autre argument des juges du fond est également critiqué par la haute Cour de casse aussi leur décision pour violation de l’article L. 1121-1 du code du travail au motif que : "sauf abus, le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées" et que "l’affichage de ce tract syndical, qui ne contenait aucun propos injurieux, diffamatoire ou excessif, ne caractérisait pas un abus de la liberté d’expression du salarié.


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